Ce fut dans la seconde moitié du conflit qu’apparut le chasseur qui fut unanimement considéré comme le meilleur de la Seconde Guerre mondiale : le North American P-51 Mustang. Cet avion exceptionnel, qui, dans ses dernières versions, atteignit les limites extrêmes auxquelles pouvait parvenir un appareil propulsé par un moteur à explosion, fut le produit de deux technologies d’avant-garde : celle de l’industrie aéronautique américaine, qui réussit à concevoir, dans le bref délai de 117 jours, une cellule perfectionnée, du point de vue aussi bien de la structure que de Paérodynamique; celle de l’industrie mecanique anglaise, qui, avec son prestigieux moteur Rolls-Royce Merlin, fournit le complément idéal.Le Mustang, en effet, serait resté pour toujours dans l’anonymat si, à un certain moment de sa carrière, il n’avait été équipé d’un propulseur anglais. Le programme qui devait donner naissance au P-51 fut conduit dès le début sous l’enseigne de la collaboration entre l’Angleterre et les États-Unis.
En avril 1940, toujours à la recherche d’avions de combat de bonne qualité, la commission d’achats anglaise envoyée outre-Atlantique proposa à la société North American de construire sous licence pour la R.A.F. les chasseurs Curtiss P-4O.L’idée n’eut pas l’air de plaire au président de la compagnie, J .H. “Dutch” Kindelberger, qui répliqua que sa société était capable de construire un avion de combat équipé de la même unité motrice que le P-40 (Allison V-1710 de douze cylindres en V, à refroidissement hydraulique), mais bien supérieur à celui-ci. La contre-proposition fut acceptée par les Anglais, qui posèrent comme seule condition que le prototype serait fabriqué en 120 jours, à cause de l’extrême gravité de la situation en Europe. L’engagement fut respecté : les ingénieurs Raymond Rice et Edgar Schmued réussirent à achever le NA-73X (ainsi fut désigné le prototype) trois jours avant la date prévue.
Le premier vol eut lieu le 26 octobre 1940, et l’avion, caractérisé par une exceptionnelle pureté de lignes, montra des caractéristiques plus que bonnes, s’avérant supérieur en vitesse au Curtiss P-40 d’une quarantaine de kilomètres-heure. Entre-temps, le contrat de 320 exemplaires pour la R.A.F. avait été approuvé par Ie gouvernement américain, avec cette clause que deux avions devraient être remis à l’U.S.A.A.C. pour des essais envol. Le premier chasseur de série vola en mai 1941 et fut pris en charge par la North American pour les tests techniques. Le second arriva en Angleterre en novembre, où il reçut l’appellation officielle de Mustang Mk.I. Ces appareils, jugés bien supérieurs à tout autre chasseur américain, furent mis en service en avril 1942 et destinés à la reconnaissance tactique. Vers la même époque, les Anglais commandèrent 300 autres exemplaires qui ne différaient que par des détails d’équipement et d’armement de bord.
Aux États-Unis, après une période de désintérêt (à peine une cinquantaine de Mustang avaient été adaptés à la reconnaissance photographique), les autorités militaires avaient passé une importante commande de 500 exemplaires d’une version spécialement étudiée pour le bombardement en piqué, appelée A-36A. Ces avions furent livrés entre septembre 1942 et mars 1943. Il y eut ensuite une autre commande de 310 P-5 lA, dont la livraison commença au printemps de 1943. Mais le Mustang était encore loin d’avoir trouvé sa configuration optimale. Presque en même temps, les techniciens anglais et américains eurent l’idée qui permit de trouver pour cet avion la meilleure formule : en Angleterre, quatre exemplaires du Mustang furent confiés à la société Rolls-Royce pour subir une série d’essais avec le moteur Merlin 61 ; aux Etats-Unis, deux avions furent remis à la North American pour qu’elle agît de même avec la version du Merlin construite sous licence par la société Packard et appelée V-6150-3. En septembre 1942 sortit le premier prototype équipé de ce moteur, le P-51 B, appareil qui se révéla totalement différent : entre autres performances, 758 km/ h à 9 145 mètres d’altitude et 5 minutes 54 secondes pour monter à 6 100 mètres.
Progrès spectaculaire par rapport aux 628 km/h à 6 100 mètres et aux 9 minutes pour monter à la même altltude, qui constituaient les performances du P-SIA. L’avion fut immédiatement mis en production au cours de l’été de 1943 et construit dans l’usine d’Inglewood sous le sigle P-51B (1 988 exemplaires) et dans la nouvelle usine de Dallas sous celui de P-51C (1750 exemplaires). L’Angleterre, qui en reçut un millier, l’appela Mustang Mk.III. Le premier P-51B fut mis en service dans la 8th Air Force stationnée en Angleterre, le 1er décembre de la même année. Au printemps de 1944 apparut la meilleure variante de production du conflit, le P-51D. Partant des expériences réalisées par la R.A.F. avec ses Mustang Mk.III, sur lesquels, pour améliorer la visibilité du pilote, on avait adopté un cockpit bombé et sans armature (appelé Malcolm Hood, du nom de son inventeur), la North American avait décidé d’étudier à fond le problème de la visibilité. Sur le P-51D, on élimina la partie postérieure du carénage du poste de pilotage, on ajouta une “nageoire” sur la dérive pour compenser la diminution de surface latérale, et l’habitacle fut couvert d’un cokpit en bulle, entièrement transparent. Le Mustang P-51D fut construit en 7 956 exemplaires; avec une puissance de 1 700 ch, il atteignait la vitesse de 703 km/ h à 7 620 mètres d’altitude.
La carrière opérationnelle du Mustang ne se limita pas à l’intense activité qu’il déploya sur tous les fronts de la Seconde Guerre mondiale. En service dans les aviations d’une vingtaine de pays, il subsista jusqu’à la guerre de Corée et ne fut remplacé que par les premiers chasseurs à réaction. Dans les différentes versions, la production atteignitun total de 15 686 exemplaires.