Cet article explore la proposition des euro-obligations défense par Kaja Kallas pour financer la modernisation des armées de l’UE et favoriser l’industrie européenne.
Problématique des acquisitions militaires européennes
L’initiative récente de la Première ministre estonienne, Kaja Kallas, de mettre en œuvre des euro-obligations défense vise à surmonter les contraintes budgétaires qui limitent la modernisation des armées européennes. Actuellement, seulement 22% des acquisitions des armées de l’UE sont auprès de l’industrie européenne, le reste étant principalement dirigé vers les États-Unis et d’autres pays non européens. Ce faible pourcentage met en lumière une dépendance marquée vers des équipements extérieurs malgré des alternatives compétitives locales. Par exemple, le F-35 américain domine les achats, éclipsant des alternatives européennes comme le Typhoon.
Cette préférence pour les produits non européens ne se limite pas à l’aéronautique mais s’étend également à des systèmes de défense anti-aérienne, où des solutions comme le SAMP/T Mamba européen sont négligées au profit du système américain Patriot, malgré une efficacité comparable et un coût moindre.
Objectif et fonctionnement des euro-obligations défense
Les euro-obligations défense, inspirées des coronabonds utilisés lors de la crise COVID-19, pourraient permettre de financer un fonds européen de 100 milliards d’euros destiné à la modernisation des forces armées de l’UE. Cette mesure ne vise pas seulement à augmenter les budgets militaires mais aussi à encourager l’achat d’équipements produits au sein de l’UE. Kaja Kallas a souligné cette proposition lors de la Conférence sur la Sécurité à Munich en 2024, mettant en avant une vision pour une autonomie stratégique accrue dans le domaine de la défense.
Toutefois, la mise en place de telles obligations doit naviguer entre les pressions du lobbying international et les habitudes d’acquisition des pays membres, qui ont souvent une préférence pour les équipements étrangers, due en partie à des considérations politiques et opérationnelles.
Retour budgétaire de l’industrie de défense européenne
L’approche proposée pour financer ces euro-obligations inclut l’utilisation des retours budgétaires générés par l’industrie de défense européenne. Cette industrie, bien que puissante, est sous-utilisée dans les acquisitions de l’UE. Le modèle envisagé suggère que les investissements dans l’industrie de défense puissent être partiellement autofinancés par les retours fiscaux et sociaux qu’ils génèrent, estimés entre 35% et 45% en Europe. Cette stratégie pourrait réduire la charge des dettes souveraines et favoriser une répartition plus équitable des dépenses de défense au sein de l’Union.
Défis à surmonter pour l’adoption des euro-obligations défense
Malgré les avantages apparents, la mise en place des euro-obligations défense rencontre des défis significatifs. L’adhésion des pays membres à un tel programme nécessiterait un changement culturel majeur dans les pratiques d’achat militaire, habituellement influencées par des alliances politiques et économiques extérieures à l’Europe. De plus, la perception de ces obligations comme favorisant certains pays, notamment la France, pourrait créer des tensions politiques et nuire à l’image de l’initiative.
Bien que la proposition des euro-obligations défense par Kaja Kallas offre une voie prometteuse pour renforcer l’autonomie stratégique de l’Europe et stimuler son industrie de défense, son succès dépendra de la capacité de l’UE à surmonter des défis politiques, économiques et culturels internes. Si réalisée, cette initiative pourrait non seulement moderniser les armées européennes mais aussi contribuer à une plus grande intégration économique et politique au sein de l’Union.
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