Les chasseurs Albatros D ont marqué l’aviation militaire allemande durant la Première Guerre mondiale, combinant des avancées techniques significatives et une participation active sur le front.
Les chasseurs Albatros D ont joué un rôle central dans l’aviation allemande durant la Première Guerre mondiale. Introduits en 1916, ces biplans monoplaces ont évolué à travers plusieurs modèles, du D.I au D.Va, chacun apportant des améliorations en termes de design et de performance. Dotés de moteurs puissants et d’une armement efficace, ils ont permis à l’Allemagne de regagner la supériorité aérienne à plusieurs reprises. Engagés dans des missions variées, les Albatros D ont été pilotés par des as renommés et ont participé à des batailles aériennes décisives. Cependant, face à l’évolution rapide de la technologie aéronautique, ils ont progressivement été remplacés par des modèles plus performants à la fin du conflit.
L’historique des Albatros D
Les chasseurs Albatros D ont émergé durant la Première Guerre mondiale, période où l’aviation militaire connaissait des avancées rapides. Le premier modèle, l’Albatros D.I, a effectué son vol inaugural en avril 1916 et est entré en service en août de la même année. Conçu par les ingénieurs Thelen, Schubert et Gnädig, le D.I présentait une structure semi-monocoque en bois avec un fuselage de section ovoïde. Propulsé par un moteur Mercedes D III de 160 chevaux, il était armé de deux mitrailleuses synchronisées LMG 08/15 de 7,92 mm. Soixante-cinq exemplaires ont été construits, contribuant à redonner à l’Allemagne une supériorité aérienne face aux Alliés.
Suite aux retours des pilotes concernant la visibilité limitée vers l’avant, l’Albatros D.II a été développé. Introduit en novembre 1916, le D.II avait son plan supérieur abaissé de 36 cm, améliorant ainsi la visibilité. Environ 275 exemplaires ont été produits, dont 75 sous licence par LVG. Ce modèle a également été fabriqué en Autriche par Oeffag, équipé d’un moteur Austro-Daimler de 185 chevaux.
L’Albatros D.III, apparu fin 1916, s’inspirait du Nieuport 11 français avec ses ailes en flèche. Malgré des problèmes structurels initiaux, il est devenu le chasseur principal de la Luftstreitkräfte jusqu’à l’été 1917. Le D.III a été produit à plus de 1 300 exemplaires, y compris les versions autrichiennes.
En mai 1917, l’Albatros D.V a été introduit, suivi du D.Va en octobre de la même année. Ces versions présentaient un fuselage plus léger et des modifications aérodynamiques. Cependant, elles ont souffert de faiblesses structurelles similaires à celles du D.III. Malgré cela, environ 1 600 D.Va ont été produits, et ces avions sont restés en service jusqu’à la fin de la guerre.

Le design des Albatros D
Les chasseurs Albatros D se distinguent par leur conception biplan monocoque en bois, combinant robustesse et aérodynamisme. Le fuselage, de section ovoïde, est construit en bois avec un revêtement en contreplaqué, offrant une structure légère mais solide. Les ailes, en bois entoilé, sont reliées par des mâts en N ou en I, selon les versions, éliminant le besoin de haubanage supplémentaire.
Le poste de pilotage ouvert est situé juste derrière le moteur, offrant une bonne visibilité. Cependant, sur le D.I, la position élevée du plan supérieur limitait la vision vers l’avant, problème corrigé sur le D.II en abaissant l’aile supérieure de 36 cm. L’empennage comprend une dérive arrondie et des plans horizontaux rectangulaires, assurant une stabilité en vol.
Le train d’atterrissage fixe se compose de deux roues principales montées sur des jambes en V et d’une béquille de queue, typique des avions de cette époque. Les versions ultérieures, comme le D.V et le D.Va, ont introduit des modifications telles qu’un fuselage de section elliptique et des ajustements aux commandes d’ailerons pour améliorer la maniabilité.
Les performances des Albatros D
Les performances des Albatros D ont évolué avec chaque version, reflétant les améliorations techniques apportées. L’Albatros D.I, équipé d’un moteur Mercedes D III de 160 chevaux, atteignait une vitesse maximale d’environ 175 km/h, avec un plafond opérationnel de 5 200 mètres et une vitesse ascensionnelle de 166 mètres par minute.
Le D.II, introduit en novembre 1916, conservait le même moteur mais bénéficiait d’une meilleure visibilité pour le pilote grâce à l’abaissement de l’aile supérieure. Sa vitesse maximale était similaire, mais sa vitesse ascensionnelle était améliorée, atteignant 330 mètres par minute.
L’Albatros D.III, apparu fin 1916, présentait des ailes en flèche inspirées du Nieuport 11 français. Malgré des problèmes structurels initiaux, il offrait une maniabilité améliorée. Le D.III pouvait atteindre une vitesse maximale de 175 km/h et un plafond de 5 500 mètres.
Le D.V, introduit en mai 1917, et le D.Va, apparu en octobre 1917, présentaient peu d’améliorations en performance par rapport au D.III. Le D.V utilisait toujours le moteur Mercedes D III de 160 chevaux, avec une vitesse maximale de 187 km/h, une vitesse ascensionnelle de 250 mètres par minute et un plafond d’environ 6 000 mètres. Cependant, les faiblesses structurelles des ailes inférieures limitaient l’usage agressif en piqué.
Le D.Va bénéficiait d’un renforcement de la cellule et d’un système de commande d’ailerons modifié, mais ces modifications ajoutaient du poids. Sa vitesse maximale restait autour de 186 km/h, et sa capacité de montée diminuait légèrement, avec environ 233 mètres par minute. Le rayon d’action opérationnel des Albatros D se situait entre 300 et 350 km, ce qui convenait aux missions de chasse à proximité du front.
Tous les modèles étaient armés de deux mitrailleuses LMG 08/15 Spandau de 7,92 mm, synchronisées pour tirer à travers l’hélice. Cette configuration standard dans les chasseurs allemands leur permettait de maintenir une puissance de feu constante sans affecter la manœuvrabilité.
L’équilibre entre performances, armement et autonomie rendait les Albatros D efficaces durant leur période de service, malgré la concurrence croissante d’appareils alliés plus modernes comme le SPAD S.VII ou le Sopwith Camel.
Les variants du Albatros D (series)
La série Albatros D comprend cinq principaux modèles de chasse : D.I, D.II, D.III, D.V et D.Va. Chaque modèle constitue une réponse directe aux besoins opérationnels évolutifs sur le front et aux contraintes liées à la supériorité technologique alliée.
L’Albatros D.I est le point de départ de la série. Avec seulement 65 exemplaires construits, il avait pour mission de rétablir la maîtrise allemande du ciel face aux chasseurs Nieuport et Airco DH.2.Son efficacité initiale fut rapidement remise en question par des problèmes de visibilité vers l’avant.
Le D.II, produit à environ 275 unités, corrigeait cette faiblesse. Il introduisait aussi des mâts en N plus rigides et un nouveau système de radiateur installé sur l’aile supérieure. Une variante produite par Oeffag en Autriche utilisait un moteur Austro-Daimler de 185 chevaux.
Le D.III marque l’évolution majeure de la série, tant sur le plan aérodynamique que technique. Son aile inférieure, plus fine, lui permettait de gagner en maniabilité mais devenait instable en piqué.1 340 exemplaires ont été produits en Allemagne, et plus de 500 en Autriche-Hongrie sous la désignation Oeffag D.III, avec des moteurs Austro-Daimler de 200 chevaux.
L’Albatros D.V, produit à plus de 900 unités, reprenait la structure du D.III avec un fuselage légèrement redessiné. Toutefois, la cellule restait fragile, en particulier au niveau de l’aile inférieure.
Enfin, le D.Va fut une tentative de corriger les problèmes du D.V.1 600 exemplaires ont été construits. Il introduisait des renforts internes, une nouvelle transmission des ailerons, et des haubans plus robustes. Cependant, ces ajouts augmentaient le poids, sans gain réel de performance.
Les modèles D.IV et D.VI sont restés au stade de prototype ou de pré-série et ne furent pas adoptés en service actif.

Les missions du Albatros D (series) au combat
Les chasseurs Albatros D ont été engagés sur l’ensemble du front occidental, entre 1916 et 1918, au sein des unités de chasse allemandes, les Jagdstaffeln. Le D.II entre en service en septembre 1916 et est affecté aux escadrilles Jasta 2 (Boelcke) et Jasta 11 (von Richthofen).Il y joue un rôle déterminant lors de la « bataille pour la supériorité aérienne » de l’automne 1916.
Oswald Boelcke, pionnier de la tactique aérienne, remporte 11 victoires en 16 jours avec un D.II.Le 17 septembre 1916, Manfred von Richthofen obtient sa première victoire confirmée à bord d’un D.II rouge.
Le D.III est le fer de lance de la Luftstreitkräfte durant le « Bloody April » de 1917.Durant ce mois, les Britanniques perdent 275 avions, principalement face à des Albatros D.III. Cependant, les faiblesses structurelles du modèle se révèlent rapidement, notamment après plusieurs ruptures d’aile en combat.
Le D.V et le D.Va continuent à être utilisés tout au long de 1917 et 1918, mais ils souffrent de plus en plus face aux nouveaux chasseurs alliés. Le SPAD XIII français, le Sopwith Camel britannique et le SE5a surpassent les Albatros en manœuvrabilité, vitesse et robustesse.
Malgré cela, les D.Va restent en service dans des rôles de couverture aérienne et d’escorte jusqu’à la fin de la guerre. Ils sont présents lors de la contre-offensive allemande du printemps 1918, notamment lors de l’opération Michael.
Un dernier mot
La série des Albatros D a progressivement été retirée du service actif à partir de la fin de l’année 1918, en parallèle de la dégradation générale de la capacité opérationnelle de la Luftstreitkräfte. L’apparition de nouveaux chasseurs alliés, plus rapides, plus maniables et mieux armés, rend les Albatros D progressivement moins compétitifs.
Le D.Va reste cependant utilisé jusqu’à l’armistice du 11 novembre 1918. Ce maintien n’est pas dû à sa supériorité, mais à l’absence d’un remplaçant immédiatement disponible en quantité suffisante. Le Fokker D.VII, entré en service à partir du printemps 1918, prend peu à peu la relève.
Le Fokker D.VII présente des qualités de vol supérieures, notamment en piqué, en manœuvrabilité à basse vitesse et en tolérance structurelle. Il est motorisé par un Mercedes D.IIIaü de 180 chevaux ou un BMW IIIa de 185 chevaux, avec une vitesse maximale de 189 km/h et un plafond de 6 000 mètres.
L’Albatros D.Va est relégué à des tâches secondaires, comme l’entraînement, l’escorte ou la protection des ballons d’observation. Certains exemplaires, usés, sont cannibalisés pour pièces ou affectés à des unités de second rang. Le moral des pilotes, souvent déçus des capacités limitées de l’appareil face aux nouveaux adversaires, est documenté dans plusieurs témoignages.
Après-guerre, quelques Albatros D.Va sont conservés à titre muséal. Un exemplaire restauré est exposé au Smithsonian National Air and Space Museum à Washington. Les modèles capturés par les Alliés sont parfois testés pour étude technique, mais ne sont pas intégrés dans leurs flottes respectives.
En synthèse, les chasseurs Albatros D ont été des avions efficaces entre 1916 et 1917, mais dont l’architecture n’a pas permis une modernisation suffisante au fil de la guerre. Ils ont servi de transition technologique entre les premiers biplans rudimentaires et les chasseurs de performance supérieure qui marquent la fin du conflit.
Retour sur la section WARBIRDS.